Fondation Théodora – Dr Pirouette © Yves Massot
L’Institut et Haute École de la Santé La Source et la Fondation Théodora formalisent une collaboration fructueuse débutée il y a plus de vingt ans, avec la signature d’un partenariat d’exclusivité entre les deux institutions dans le domaine de la formation des docteurs Rêves notamment à l’hygiène hospitalière et à la relation.
Par David Trotta – Rédacteur, Institut et Haute École de la Santé La Source
Apporter un moment de joie et de bonheur à des enfants le temps d’une hospitalisation, c’est bien. Le faire dans les meilleures conditions pour ne pas se transformer en propagateur de microbes ou autres germes, c’est mieux. Comment faire pour éviter le faux pas ? Une question au cœur de la formation des docteurs Rêves de la Fondation Théodora, qui rendent visite chaque année à plus de 100’000 enfants pour leur donner le sourire, ne serait-ce qu’un instant.
Une formation d’environ 360 heures, entre modules théoriques et stages pratiques, qui donne aujourd’hui lieu à un partenariat d’exclusivité entre La Source et la Fondation Théodora, notamment dans le domaine de l’hygiène hospitalière et au fonctionnement hospitalier, après plus de vingt ans d’une fructueuse collaboration. Mais pas seulement. « Ce partenariat s’inscrit dans l’évolution de la formation des docteurs Rêves et nous permet de pérenniser notre collaboration », se réjouit Miriam Bass Costantini, Directrice de l’Académie, département en charge de la qualité et du développement à la Fondation Théodora. Et d’ajouter : « La collaboration a toujours fonctionné dans les deux sens. Nous bénéficions du savoir-faire de La Source en termes de formation aux aspects d’hygiène et de structure hospitalières, un gage de qualité pour nos partenaires. Et nous apportons les compétences des docteurs Rêves dans d’autres secteurs, notamment la communication pour entrer en lien avec les patients, puisque certains interviennent dans les formations proposées à La Source. »
Hygiène et structure hospitalières, des aspects qui ne viennent pas nécessairement à l’esprit en pensant à ces artistes qui égayent le quotidien d’enfants malades, qu’évoque Ludovic Martin, enseignant lausannois de 45 ans, docteur Rêves en formation. Interview à découvrir ci-dessous.
Actuellement en formation, Ludovic Martin intégrera prochainement les docteurs Rêves de la Fondation Théodora. Photo David Trotta © Institut et Haute École de La Santé La Source
Pour vous, c’est quoi un docteur Rêves ?
C’est un personnage loufoque, décalé, qui s’enthousiasme d’à peu près tout. Il va à la rencontre des enfants hospitalisés et de leur famille, parents, grands-parents, frères et sœurs pour leur offrir une petite bulle spéciale de joie, d’émerveillement et de rire. Une parenthèse dans un contexte qui peut être difficile ou anxiogène pour permettre de s’évader. C’est aussi un moyen de créer des souvenirs positifs de l’hôpital.
Pourquoi avez-vous eu envie de devenir docteur Rêves ?
J’ai toujours su que les docteurs Rêves existaient, même si je n’en ai jamais vraiment beaucoup côtoyé. J’ai toujours trouvé qu’il s’agissait d’une activité assez rare et qu’offrir cette bulle de joie ressemblait à un beau job. J’ai l’impression, en exerçant déjà en tant que stagiaire, que nous sommes utiles. Pas pour soigner évidemment, mais nous avons notre propre utilité.
En quelques mots, pouvez-vous nous décrire votre parcours ? Venez-vous d’un milieu artistique, du théâtre peut-être ?
J’ai fait le conservatoire de théâtre après le Gymnase, qui existait avant que n’arrive la Haute école des arts de la scène. J’ai donc une formation de théâtre et ai travaillé comme comédien. J’ai aussi une formation d’enseignant dans les écoles primaires et ai donné des ateliers de théâtre dans les écoles. J’ai donc une solide expérience avec les enfants. J’ai ensuite fait des stages d’art clownesque. Tout cela mis ensemble, j’ai eu l’impression de réunir de nombreuses compétences pour devenir un docteur Rêves.
Vous êtes maintenant en formation pour devenir docteur Rêves. En quoi consiste-t-elle ?
C’est une formation la plus complète possible pour pouvoir exercer l’activité. Il y a donc une partie théorique qui nous enseigne le milieu hospitalier, l’hygiène hospitalière, le rapport à la maladie, aux enfants, les situations difficiles, la mort, etc. Toute cette partie nous est enseignée à La Source. Nous suivons aussi une formation artistique en collaboration avec l’Académie de Théâtre Dimitri, sur l’improvisation, sur l’art clownesque, en lien évidemment avec l’activité de docteur Rêves. Pour la pratique, nous effectuons déjà des visites de stage après le premier module de formation, avec un docteur Rêves « senior » qui nous fait découvrir l’activité. Nous intervenons déjà en docteur Rêves « stagiaire », même si nous n’avons pas encore défini notre propre personnage.
On n’imagine pas forcément les aspects d’hygiène hospitalière quand on pense aux docteurs Rêves. Vous attendiez-vous à recevoir une formation sur ces aspects ?
Ça ne m’a pas surpris, justement parce que nous intervenons dans un contexte hospitalier. Il nous faut donc connaître les règles d’hygiène spécifiques à ce cadre. Ça me paraît important et ça me rassure qu’on me donne les bons outils pour ne pas faire de faux pas.
Quels sont ces outils ? À quoi devez-vous être attentif ?
On insiste beaucoup sur la désinfection des mains. De le faire à chaque fois que nous entrons et sortons d’une chambre. Nous devons aussi faire attention à ce que nous touchons. L’idée, c’est que nous ne sommes pas là pour propager des microbes ou des maladies. Notre costume doit être propre, il faut désinfecter le matériel utilisé, avoir le moins de contact physique possible, ne pas donner et reprendre des objets sans faire attention. On nous apprend aussi des situations comme l’isolement, quand il y a des enfants avec des maladies graves, qui doivent être protégés ou au contraire qui pourraient nous infecter ou infecter quelqu’un d’autre. Avant une intervention, le personnel infirmier nous informe de qui nous allons rencontrer, quelles sont les maladies, etc. C’est très important d’apprendre tout cela aussi pour savoir dans quel ordre nous allons faire les visites. Une fois encore, pour ne pas propager des microbes ou des maladies.
Vous le disiez, vous êtes confronté à des situations parfois difficiles voire dramatiques. La formation vous aide-t-elle justement à bien les appréhender ?
Oui, parce qu’on nous apporte tous les outils nécessaires pour exercer du mieux possible cette fonction. Et nous parlons beaucoup, nous débriefons sur les situations vécues. Nous avons de vrais espaces de parole pour faire tampon quand nous avons rencontré des situations difficiles. Nous avons beau incarner un personnage, nous sommes aussi des êtres humains avec nos émotions propres. Le personnage permet d’avoir une distance, certaines situations restent toutefois difficiles à affronter.
Vous êtes en ce moment en formation à La Source, vous avez déjà réalisé des stages sur le terrain. Comment appréhendez-vous ces deux dimensions ? Ces allers-routes vous aident-ils à être peut-être plus attentif à certains aspects lorsque vous effectuez des visites ?
La formation est très bien conçue. Les premiers modules nous apportent justement les bases de l’hygiène hospitalière et de l’improvisation avant de réaliser les premières visites. Nous rédigeons aussi un rapport après chaque visite de stage. C’est un support de réflexion qui nous permet de faire des liens entre la théorie et la pratique. Ces allers-retours sont constants au cours de la formation.
Vous évoquiez un peu plus haut le personnage. En avez-vous déjà un ?
C’est une réflexion qui se fait assez vite. Nous avons des idées et nous les testons lors de nos visites. Les enfants nous demandent évidemment comment nous nous appelons. On teste aussi les noms, pour voir s’ils marchent auprès des enfants, s’ils arrivent à répéter. Ça se fait petit à petit, mais le personnage final, avec un nom et un univers, n’est validé qu’en fin de formation. Vient ensuite la création de la blouse du docteur Rêves, en collaboration avec une couturière qui va la créer selon nos envies et après discussion commune. C’est l’aboutissement de toute une réflexion entamée dès le début de la formation. J’ai quelques idées, mais pour l’instant je les garde pour moi (rires) !
Depuis 1993, la Fondation Théodora poursuit son objectif de soulager par le rire le quotidien des enfants hospitalisés ou en institutions spécialisées. Chaque semaine, la Fondation organise et finance les visites de 68 artistes professionnels, appelés docteurs Rêves, dans 32 hôpitaux et 27 institutions pour enfants en situation de handicap. Chaque année, ces personnages amusants et attachants effectuent plus de 100000 visites auprès d’enfants en Suisse, afin de leur offrir des sourires et des moments de joie. Spécialement formés pour pratiquer leur art en milieu hospitalier, les docteurs Rêves travaillent en collaboration avec le personnel soignant.
La Fondation Théodora propose différents programmes adaptés aux besoins des enfants et aux situations auxquelles ils sont confrontés. La Fondation est reconnue d’utilité publique et ne demande aucune subvention étatique. Le financement de la visite hebdomadaire des docteurs Rêves auprès des enfants repose entièrement sur le soutien des donateurs et partenaires.