Interprofessionnalité et simulation: l’art de la préparation

Bien au-delà d’une simple installation de patient·es dans un lit, la simulation nécessite une préparation minutieuse, une orchestration précise et des compétences multiples. À commencer par l’interprofessionnalité. Immersion, dans le Journal La Source.

Mannequin dans son lit. Guy Stotzer © La Source

Par Guy Stotzer, Administrateur des Technologie de Simulation en Soins, Institut et Haute École de la Santé La Source

C’est l’histoire fictive de M. Lassina, 42 ans, marié et trois enfants. Il souffre de la maladie de Crohn. Ce lundi matin, il rentre aux urgences à la suite de douleurs abdominales et de nausées. Il a une forte fièvre et arrive en taxi. M. Lassina est diagnostiqué avec une péritonite aigüe. Il est opéré en urgence et transféré en soins continus. À son réveil, il découvre Mathilde, l’infirmière qui s’occupe de lui.

Scénarisation d’un cas réel qui pourrait être repris en simulation pour des étudiant·es en soins infirmiers, quels en sont les impacts en termes de préparation sur cette simulation ?

Apprentissages critiques et objectifs pédagogiques

Le scénario de M. Lassina est le dénominateur commun pour toutes les personnes impliquées dans cette simulation. Il dicte ce qui devrait être fait par l’étudiant·e et ce qui en est attendu. L’écriture du scénario, un des premiers actes de préparation, va notamment permettre de définir les objectifs pédagogiques. Il va aussi permettre de déterminer les outils et les technologies qui seront déployées, le moulage (plaies, maquillages, etc.) à mettre en place et le déroulement de la simulation durant un temps T. Il en détermine la faisabilité.

Durant la simulation, les apprentissages seront axés sur la réfection du pansement à la suite de l’opération du patient, la pose d’une nouvelle sonde vésicale et d’une transmission d’informations à sa sœur.

Environnement et choix des patient·es

Afin d’immerger les étudiant·es dans un environnement le plus réaliste possible (haute-fidélité), équiper une chambre simulée dans laquelle se réveillera M. Lassina consiste à recréer une chambre de soins continus. Dont des pousse-seringues, des pompes volumétriques, des perfusions, un scope, des alarmes, des senteurs, des bruits et bien entendu des patient·es. Étape capitale, elle doit permettre à l’étudiant·e de rentrer immédiatement dans la simulation.

Une fois le scénario validé, place au choix du type de patient·e : un·e patient·e simulé·e (PSim) pour jouer des scénarios axés sur des récoltes de données, des anamnèses, des interactions soignant·e – patient·e / proches. Le choix se portera sur une simulation hybride s’il y a une mixité entre des interactions et des gestes invasifs légers de type auscultation (i.e. via des patches qui simulent des pathologies) ou prise de sang (i.e. faux bras remplis de sang). Un mannequin, lorsque des gestes invasifs lourds avec risques physiques doivent être pratiqués (i.e. réanimation avec évolution des paramètres). Dans le cas de M. Lassina, un mannequin haute technicité sera mis en place pour le sondage vésical et un·e acteur·rice jouera le rôle de sa sœur pour les interactions avec l’étudiant·e.

Côté préparation, les PSims bénéficient d’une formation et de séances de répétitions afin de leur permettre de maîtriser leur rôle. Pour les mannequins de moyenne et de haute technicité, une programmation peut être effectuée. Lors de simulations hybrides, les PSim sont équipé·es, connecté·es aux outils technologiques définis par le scénario.

La vidéo comme outil pédagogique

Lorsque les étudiant·es volontaires entrent en scène, les autres restent dans la salle d’observation pour visionner la simulation via retransmission vidéo. La gestion des flux audiovisuels doit donc être anticipée et préparée en regard de la répartition des étudiant·es dans les différents espaces.

Des enregistrements sont aussi planifiés afin de permettre aux étudiant·es entré·es en simulation de se revoir a posteriori, pour combler les lacunes qui existent entre leur perception et ce qui s’est réellement passé dans la chambre. Ce différentiel est lié au stress vécu en chambre. La vidéo sert alors de rappel factuel de leur simulation et permet de faire des liens avec les échanges lors du débriefing.

Sans oublier les autres technologies prises en compte suite à la rédaction du scénario, dont le dossier patient informatisé (DPI), les scopes fictifs (monitoring), l e s glucomètres ou les saturomètres simulés. Des faux-médicaments sont confectionnés, des consommables (pansements, aiguilles, seringues, etc.) sont préparés et mis à disposition.

Interprofessionnalité

L’efficience d’une simulation repose sur une préparation optimale qui exige un haut degré d’anticipation, de collaboration et de coordination entre les ensignant·es et les membres de l’équipe de simulation. Une interprofessionnalité de rigueur, qui s’opère tant au niveau pédagogique, technologique, logistique qu’avec les patient·es simulé·es. De même qu’elle est à l’œuvre, afin d’anticiper tous les besoins, lors de chacune des étapes de réalisation d’une simulation : l’écriture (idée du scénario), la production (mise en scène), la réalisation (mise en œuvre) et l’évaluation (mise en perspective).

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